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Après trois jours d’attente, les résultats du scrutin législatif du 6 mars sont tombés ce mardi. La Commission électorale a donc annoncé la victoire du parti au pouvoir, le RHDP (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix), qui conserve donc sa majorité. L’opposition représente désormais 36% des sièges alors que les proches de Laurent Gbagbo faisaient leur grand retour après 10 ans d’absence. Quels enseignements tirer de ce scrutin ? Éléments de réponse avec Sylvain N’Guessan, analyste politique ivoirien.
RFI : Quel bilan tirez-vous de ce scrutin ?
Sylvain N’Guessan : Ces élections se sont très bien passées. C’est l’une des rares fois depuis 1995 qu’il n’y a pas eu de violence en tant que telle. Donc, c’est une chose qui est à saluer dans un premier temps.
Le président Ouattara avait donné à ses équipes comme cap d’avoir autant d’élus que dans l’assemblée sortante. Finalement, le RHDP a 137 sièges contre 146 auparavant. Perd-il un peu de terrain ?
Le RHDP perd un peu de terrain. Il y a quand même l’EDS [Ensemble pour la démocratie et la souveraineté], c’est-à-dire le FPI tendance Laurent Gbagbo, qui revient dans le jeu. Il y a aussi le PDCI qui est sorti de l’alliance avec le RHDP. Donc tout cela fait que le RHDP a perdu quelques voix. Mais quand même, avoir 137 sièges dans une élection, avoir plus de la moitié, c’est une large victoire pour le RHDP.
Une victoire attendue ?
Oui, elle était attendue. Le RHDP était mieux structuré, était plus en contact avec les populations, dispose de plus de moyens contrairement au FPI [Front populaire ivoirien] qui avait disparu de la scène depuis 10 ans et qui n’était plus en contact avec les électeurs. Le RHDP partait favori.
L’opposition se maintient-elle ?
L’opposition se maintient, mais le résultat n’est pas fameux. Le FPI s’en sort avec deux députés après avoir géré l’exécutif pendant 10 ans, le PDCI [Parti démocratique de Côte d’Ivoire] est en net recul même s’il résiste encore. L’opposition s’en sort avec un résultat qui est, à mon avis, en deçà de ses attentes. Ses attentes, c’était au moins la moitié de l’électorat, malheureusement la stratégie n’a pas suivi avec la division. Tout cela n’a pas joué en faveur de l’opposition.
Le PDCI reste-t-il la première force d’opposition ?
Le PDCI a quand même résisté malgré la perte de certains cadres en 2018 qui ont rejoint le RHDP. Le résultat est bon pour ce parti qui a connu tant de crises ces dernières années. Ils ont géré ce pays pendant près de 40 ans donc ils ont eu le temps d’avoir plusieurs cadres dans différentes localités. Aussitôt que l’un d’eux quitte le parti, il y a une autre tête qui se lève. Puis, ils disposent d’un peu plus de moyens, ils sont restés en coalition avec le RHDP jusqu’en 2018. Ils ont acquis plus de moyens qu’EDS par exemple.
Le taux de participation est de 37,88%. C’est quatre points de plus qu’en 2016. Ce taux de participation est-il un surprise ?
C’est plus que l’on attendait. Dans la sous-région, c’est en général autour de 33,5% pour des élections législatives. Je pense que c’est le plus grand taux de participation à une élection ces dernières années en Côte d’Ivoire. C’est presque étonnant parce que le jour du vote, pour les localités que j’ai parcourues, cela ne laissait pas présager un si grand nombre. Mais bon, le nord du pays a voté, il y a des agglomérations qui ont fait 100%. Quand on ajoute cela à l’arithmétique, ça fait presque 38%.